Dossier Quelles solutions contre la crise ? « Face à la cupidité, redonnons de l'éthique à l’économie ! » | La lettre de Toulouse | Scoop.it

Le modèle coopératif c’est une voie différente pour une économie plus humaine, affirme Henri-Jacques Buchet, directeur général de 3A COOP, spécialisée dans les produits laitiers. L’anti-modèle d’un capitalisme destructeur.

 

- Henri-Jacques Buchet, vous êtes directeur général de 3A Coop. Le modèle coopératif, c’est une autre vision de l’entreprise ?

 

Après dix ans passés chez L’Oréal, j’ai découvert le modèle coopératif par hasard et je me suis rendu compte qu’il représente une réelle alternative économique dans un monde en état de crise permanent. Le système coopératif est une véritable réponse à la mondialisation. 3A Coop est une entreprise ancrée dans son territoire, les actionnaires sont les producteurs, des gens de terrain qui défendent la qualité et l’authenticité de leurs terroirs. Ce type de structure n’est pas « opéable », ni délocalisable. Elle n’est pas cotée en bourse et ses dirigeants n’ont pas de parachute doré. On investit uniquement dans les outils et les hommes. Ce qui n’empêche pas une gestion efficace.

 

- Les coopératives peuvent-elles trouver leur place dans la mondialisation ?

 

Il est tout à fait possible de faire cohabiter des entreprises mondiales avec des structures régionales quand elles proposent des produits de qualité. Nous avons, par exemple, réussi à référencer notre cantal chez McDo.

 

- Comme les autres, vous êtes tributaires de la grande distribution ?

 

La grande distribution fait la loi et refuse toute hausse de prix. Il n’y a pas de marges de manoeuvre et cela est dramatique. Pour sauver la filière lait qui est en grande difficulté, il faudrait augmenter le litre de trois centimes à la vente. Des producteurs travaillent à perte, tout le monde s’en fiche. Je suis indigné et révolté contre ce modèle qui symbolise notre société, qui tire tout vers le bas et qui, sous prétexte de vendre moins cher, détruit des emplois et des productions de qualité.

 

- La coopération ne restera-t-elle pas une utopie dans la guerre économique planétaire ?

 

La crise économique très grave que nous connaissons est d’abord liée à un phénomène humain qui s’appelle

 

la cupidité.

 

Un sentiment exacerbé dans une société qui ne cherche qu’à consommer. Il est essentiel de restaurer de l’éthique, dans l’entreprise comme partout, de mettre en valeur les modèles qui ne soient pas fondés sur l’enrichissement de quelques uns. Les écarts se creusent de façon inquiétante, l’égalité n’est plus qu’un vague concept, nous allons dans le mur. Le modèle coopératif, trop peu répandu, porte des valeurs. Il associe un groupe de personnes qui travaillent ensemble et qui partagent une vision de la société et de l’économie. Cela peut paraître utopique mais c’est une solution d’avenir car on ne s’en sortira qu’en redonnant du sens aux activités économiques. Encore faut-il que le consommateur puisse payer le juste prix.

 

Propos recueillis par B.D.