La ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse se fera-t-elle ? | Toulouse La Ville Rose | Scoop.it

On la prenait pour acquise. Mais les doutes récents sur le financement de la ligne à grande vitesse entre Toulouse et Bordeaux, émis par certains politiques locaux, remettent la question de son existence sur le tapis.

 

Ce mercredi 18 février à l’Assemblée nationale, le secrétaire d’État aux Transports Alain Vidalies a déploré « les choix qui ont été faits ces dernières années notamment de lancer quatre LGV (lignes à grande vitesse) nouvelles en même temps (qui) se sont faits au détriment (…) de l’entretien des infrastructures existantes, et aujourd’hui (de) la fiabilité du réseau, en partie ».

Cette intervention du secrétaire d’État vient encore nourrir les intenses débats autour des projets de LGV. Dans son magazine numéro 21, actuellement en kiosque, la rédaction de ToulÉco s’était justement interrogée sur l’avenir du TGV Toulouse-Paris via Bordeaux dans sa traditionnelle Question qui fâche. Elle vous propose aujourd’hui de retrouver l’article en version Web.

« Il faut s’accrocher à ce projet ! Pour rivaliser mondialement, il faut mettre les centres-villes de Bordeaux et Toulouse à une heure », campe Alain Di Crescenzo, président de la chambre de commerce de d’industrie de Toulouse, fervent défenseur de la construction de la ligne à grande vitesse (LGV) entre Bordeaux et Toulouse. De même, Françoise Barutello, présidente du club Réussir, membre tout comme la CCIT d’Eurosud Transport, l’association créée en 1991 par le conseil régional de Midi-Pyrénées pour porter le projet, ne voit pas « comment Toulouse, métropole régionale et certainement capitale de la future grande Région, ne pourrait pas accueillir le TGV ». « Pour nous, chefs d’entreprise, ce n’est pas envisageable que la LGV ne se fasse pas », ajoute-telle.

C’est aussi la position de Martin Malvy, le président de la région Midi-Pyrénées, qui indiquait que « le processus continue selon le calendrier que nous avons négocié avec le gouvernement », en réponse au rapport de la Cour des comptes publié le 23 octobre 2014 pointant la gabegie financière des projets de LGV. Depuis le 7 janvier dernier, l’enquête publique relative au projet de la LGV sud-ouest, dite GPSO, est close. La commission d’enquête rendra ses conclusions d’ici quelques semaines. La mise en circulation des premières rames est envisagée pour 2024, le début des travaux pour 2018. « C’est demain, 2018 », précise Françoise Barutello.

Une facture insupportable

Cependant, en janvier, Pierre Izard, président du conseil général de la Haute-Garonne,
a créé la surprise en faisant part de ses doutes sur la réalisation de cette infrastructure. « Défenseur de la LGV depuis vingt-six ans », il s’interroge aujourd’hui sur la faisabilité d’une ligne dont le coût est actuellement estimé à 9,5 milliards d’euros pour relier Paris et Toulouse via Bordeaux en trois heures et dix minutes. « Nous avons bien vu que l’État est en crise économique, que les collectivités sont de fait plus sollicitées. Pour la LGV, on réclame au conseil général de la Haute-Garonne 600 millions d’euros actuellement contre 315 au dernier pointage. Or 600 millions,
c’est insupportable pour la Haute-Garonne aujourd’hui. »

Et de rappeler que « tous les départements de la région se désistent un à un », après l’exemple du Gers, qui a refusé dès février 2012 d’abonder à hauteur des 8 millions d’euros qui lui étaient réclamés pour financer la portion Bordeaux-Tours, sans laquelle le GPSO n’a pas lieu d’être. Le financement reste le point faible du dossier quand les retombées ne sont pas assurées dans les mêmes proportions qu’annoncées selon la Cour des comptes. L’organisme de contrôle a mis en évidence que les études de faisabilité surestiment les prévisions de trafic et de retombées économiques à long terme pour tous les projets de LGV en France.

Un budget mal ficelé

C’est ce qui crée le malaise au conseil général de la Haute-Garonne : « Vérification faite, le TGV n’est plus rentable et réservé à une élite au final. La LGV n’est donc pas une panacée », en conclut Pierre Izard. Alain Di Crescenzo en convient : « C’est un problème que de boucler le budget de notre LGV ». Le flou autour de la facture finale discrédite peu ou prou le projet. Selon les associations qui combattent le projet, le coût du matériel roulant n’a en effet pas été calculé. « Pour boucler le budget, une étude se justifieraient pour véritablement quantifier les retombées économiques. Certes, il y a la rentabilité sur laquelle se focalise la Cour des comptes, mais de nombreux éléments sont induits, parmi eux l’équité du territoire par exemple », poursuit le président de la CCI. « Ce serait une bonne idée qu’une telle étude », insiste-t-il.

Martin Malvy continue d’y croire lui aussi et rappelle que le GPSO a été retenu comme « seule priorité de rang 1 du réseau TGV par le rapport Mobilité 21 (chargé de faire le tri dans les grands projets d’infrastructures nationaux, NDLR) ». Il n’empêche, Pierre Izard est « plus que pessimiste sur la faisabilité du GPSO dans la mesure où le TGV n’est plus intéressant, ni même innovant » : « Nous attendons des nouvelles, mais c’est au point mort et c’est inquiétant. Car plus on prend du retard, plus on a la certitude que ça ne se fera pas ! »
Nathalie Malaterre